N’ayons pas peur de nos émotions

Selon une croyance bien ancrée dans notre société, les émotions et les sentiments n’ont pas de place dans le monde professionnel. Nous devrions séparer nos émotions du problème à traiter. Pourtant, il est très difficile de parvenir à une maîtrise d’un problème lorsque les émotions sont le « cœur » du problème. Comment réussir à trouver un accord, lorsque votre interlocuteur se sent incompris ou ne vous fait pas confiance ? Les émotions ont une incidence sur le comportement des individus. C’est pourquoi, il est important de savoir les identifier et les influencer. Il ne s’agit pas d’éviter les émotions mais de faire preuve d’agilité émotionnelle c’est à dire accueillir et accepter les émotions pour en tirer parti.

Les émotions ont un rôle prépondérant dans la gestion de la communication et savoir interagir est l’un des quatre piliers fondamentaux du Savoir-être du Contract manager1. Elles ont une grande utilité pour le Contract manager car elles l’aident à comprendre son environnement et à s’adapter à celui-ci. L’émotion doit être perçue comme une opportunité de se comprendre soi-même et de comprendre son interlocuteur pour adapter sa posture, son discours ou encore ses actions.

Le Contract manager a un rôle de Facilitateur

Le Contract manager qui développe une intelligence émotionnelle et relationnelle peut exercer avec aisance un rôle de Facilitateur. Cette mission consiste à faciliter la communication avec les parties prenantes d’un contrat ou d’un projet pour diminuer les risques de conflits.

Les étapes pour y parvenir sont les suivantes :

  • Analyser l’environnement, le fonctionnement et les besoins des acteurs afin d’identifier les problèmes ;
  • Améliorer la compréhension des acteurs entre eux afin de les aider à avancer vers une solution ;
  • Adapter les méthodes de communication à son interlocuteur en tenant compte de ce dernier et de sa situation.

Lors d’une réunion ou d’une négociation, il y a trois phases bien distinctes au cours desquelles le Contract manager exerce un rôle de Facilitateur :

  • Phase de préparation : Le Contract manager va cadrer l’intervention avec les acteurs : invités, délais, ordre du jour etc… Il va s’assurer que l’ensemble des acteurs aient une bonne compréhension des objectifs et des résultats à atteindre. Si besoin, il s’assure que le support de communication soit en adéquation avec l’intervention. La préparation est la clé de succès d’une intervention réussie.
  • Phase d’intervention : Lors de cette phase, le Contract manager assume plusieurs responsabilités pour fluidifier les échanges :
    • Instaurer et conserver une relation de confiance et de sécurité indispensable à une communication efficace. Le Contract manager doit s’assurer que chacun puisse s’exprimer librement.
    • Progresser vers l’objectif : Vérifier la compréhension par tous et synthétiser les différents points de l’ordre du jour.
    • Recadrerl’intervention:Veilleraurespectdutempsetàdésamorcerles tensions. Le Contract manager ne doit pas se laisser absorber par la position ou la posture de son interlocuteur.
    • Formaliser chaque étape ou point de décision : Cela permet de conclure un sujet et de passer au suivant avec l’accord des participants.

  • Phase après-intervention : Il s’agit de transmettre la synthèse des échanges, de formaliser et de veiller au respect des engagements qui auraient été pris.

Ce rôle de Facilitateur ne se cantonne pas uniquement aux réunions ou aux négociations. Au quotidien, le Contract manager facilite les échanges notamment entre les membres de l’équipe projet. A titre d’exemples, il peut être amené à traduire le besoin du maître d’ouvrage auprès de l’acheteur ; vulgariser les points contractuels pour les opérationnels ; traduire les problématiques de terrain auprès de la direction juridique ou encore résoudre les conflits internes liés le plus souvent à de l’incompréhension ou à l’absence de prise en considération du point de vue de chacun.

Une communication empathique

Tout cela passe notamment par l’empathie. L’empathie est la capacité à reconnaître les sentiments, les points de vue d’un interlocuteur : entrer dans la logique de l’autre.

On distingue trois formes d’empathie :

  • L’empathie émotionnelle qui consiste à identifier les émotions de l’autre sans nécessairement les partager ;
  • L’empathie cognitive qui consiste à comprendre les émotions des autres ;
  • L’empathie comportementale : il s’agit d’un élément de la communication non verbale qui désigne l’imitation involontaire des gestes et/ou postures de son interlocuteur (croisement de bras ou des jambes, sourire etc.).

L’empathie participe à une communication constructive et va permettre au Contract manager, entre autres, de :

  • Communiquer efficacement avec l’ensemble des parties prenantes d’un contrat ou d’un projet ;
  • Influencer les comportements ;
  • Résoudre des conflits en identifiant les causes profondes et en proposant des solutions en adéquation avec les besoins de son interlocuteur ;
  • Négocier avec aisance. Un des outils qui permet de développer l’empathie est l’écoute active. Il s’agit d’une méthode de communication qui consiste à moins parler pour mieux écouter le message de son interlocuteur afin de recueillir des informations pertinentes pour pouvoir rebondir. Cette technique repose notamment sur :
  • Les questions ouvertes qui permettent de creuser les problématiques et de découvrir les causes réelles des objections. Elles commencent par le fameux QQOQCP (Quoi, Qui, Où, Quand, Combien, Pourquoi).
  • La reformulation qui est définie par Carl Rogers et G. Marian Kinget avec la citation : « [la reformulation] a pour but d’extraire du contenu communiqué le sentiment inhérent à ses paroles et à le lui communiquer sans le lui imposer. »2

Toutes ces techniques sont faîtes pour instaurer une relation de confiance et pour s’adapter à son interlocuteur afin de collecter de l’information et influencer les comportements.3

Vous l’aurez compris,l’intelligence émotionnelle et relationnelle sont essentielles à une bonne stratégie de communication et contribuent à diminuer les risques de dérives et de conflits. Le Contract manager qui possède ces qualités lui permettent d’avoir en toutes circonstances la bonne attitude et le comportement adapté.

Sofia HASSED
Senior Contract manager
SINERGIE – Agence de contract management

  1. AFCM – Contract manager : les 4 savoir-être et 16 qualités que l’on recherche
  2. Carl Rogers et G. Marian Kinget Psychothérapie et relations humaines, 4e édition, Montréal, Institut de recherches psychologiques et sociales, Vol. II, 1969.
  3. Chris Voss et Thal Raz – « Ne Coupez jamais la poire en deux »